Cinécult’
Michael Cimino, l'homme de l'ombre

Si le destin en avait décidé autrement, Michael Cimino serait probablement devenu le Griffith du cinéma américain contemporain, car l’homme est brillant, fou et initiateur de projets pharaoniques et démesurés comme en témoignent deux films qu’il réalise en 1978 et 1980 : Voyage au bout de l’enfer et La porte du paradis.

Le premier film obtint un succès public et critique considérable (cinq Oscars dont celui du meilleur Film et de la Meilleure mise en scène), le second fut un échec colossal et le plus gros naufrage de l’histoire du cinéma. Une défaite cuisante dont Cimino ne s’est jamais totalement remis.


L'enfer après le paradis

En 1985, tandis que la profession ne veut plus entendre parler de lui, Dino De Laurentiis accepte pourtant de produire L’année du dragon. Film plus sobre et direct que les précédents, porté par un Mickey Rourke effarant dans le rôle d’un inspecteur de police d’origine polonaise désireux d’en découdre avec la communauté asiatique de San Francisco, le film écope encore de critiques incendiaires… Les années 80 seront pour lui une période de vache maigre. Sa grandeur mélancolique et morbide, la démesure de sa mise en scène et l’emphase de ses sujets ne sont plus de mise. C’est l’ère du divertissement pour ados, d’Indiana Jones, et d’un public qui, las des atermoiements de la décade précédente, a choisi de croire à nouveau en une Amérique conquérante et sûre d’elle (voir la série des Rambo). En 1987, Cimino tourne Le Sicilen, incarné par un Christophe Lambert pathétique, et tente de faire revivre la personnalité de Salvatore Giulano. Mais le film est un échec et il faudra attendre 1990 pour le voir retourner à ses premières amours : le western.


Retour au western

Avec Desperate Hours (La maison des otages), remake éponyme du film que William Wyler réalisa en 1955 avec Humphrey Bogart, Cimino signe une ode splendide aux films noirs et aux grands espaces. Mais pas plus que L’année du dragon ou Le Sicilien, Desperate Hours ne parvient à trouver son public. Dès lors, la carrière de Michael Cimino, en dépit de Sunchaser (réalisé en 1996), appartient au passé. Mais revenons au tout début.

 

Mickey Rourke dans L'année du dragon (1985)


Les mythes fondateurs malmenés

Lorsqu’il réalise Voyage au bout de l’enfer en 1978, Michael Cimino entame sa trente-cinquième année et ne possède à son actif qu’un seul film, Le canardeur, où il dirigea le duo Clint Eastwood/Jeff Bridges. Construit en trois parties, Voyage au bout de l’enfer évoque le destin tragique d’une bande d’amis (Robert De Niro, Christopher Walken, John Savage et John Cazale), ouvriers sidérurgistes dans un bled paumé de Pennsylvanie. L’engagement américain au Viêtnam les contraint à partir combattre dans le merdier. Là-bas, ils découvrent l’horreur absolue, la misère, la guerre, la torture (la scène de la roulette russe compte parmi les séquences de guerre les plus éprouvantes jamais tournées). De retour au pays, Robert De Niro subit les ravages du conflit, incapable de mener une vie normale, aussi bien amoureuse que professionnelle. Un film magistral, éblouissant, s’achevant par un God Bless America chanté par les survivants pour conjurer la mort de l’un d’entre eux. En un film, Michael Cimino s’impose comme l’un des grands cinéastes des Seventies, années marquées par la guerre, les assassinats politiques, la dépression économique et la remise en cause des mythes fondateurs de l’idéologie américaine.


La fin d'un mythe

Avec Heaven’s Gate (La porte du paradis) en 1980, qui relate les affrontements violents qui opposèrent des éleveurs et des fermiers dans le comté de Johnson (Wyoming) en 1890, Cimino signe une épopée mélancolique de quatre heures (on ne verra la version intégrale qu’une dizaine d’années plus tard), dont l’ambition griffithienne consiste à raconter l’histoire de l’Amérique. L’échec monumental du film, pourtant grandiose, marquera durablement la carrière de Cimino qui, jamais, ne parviendra à s’en remettre. Sa disparition, le 2 juillet dernier, sonne comme la fin d'un mythe qui n'a jamais souhaité en être un.




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