le 29 août 2017 - 08h39

Tobe Hooper, l’étoile du Mal s’est éteinte

Il restera une bande de génies du malaise américain. Chacun, à sa manière, féru du genre horrifique, moyennant autant d’espaces monstres que de topographies singulières : le désert d’Apple Valley élu par Wes Craven (La colline a des yeux, 1977), les édens submersibles initiés par George A. Romero, le havre de terreur localisé au Texas dans le chef‑d’œuvre culte de Tobe Hooper : Massacre à la tronçonneuse (1974). Il s'est éteint samedi dernier, 26 août, à l'âge de 74 ans.

A

Leurs points communs, des films témoins d’une Amérique génitrice de ses propres monstres, une vision déceptive à l’égard des manquements de la contre‑culture, des bijoux de cinéma taillés dans l’urgence et la contrainte de budgets dérisoires, enfin, un sens du timing déconcertant quand on connaît l’humour qui point à travers l’humeur sombre de leurs fictions.

 

Le 30 août 2015, Wes Craven, le papa de Freddy Krueger, nous quittait. En 2017, l’été s’achève comme il a commencé, meurtrier en somme, après George Romero, Tobe Hooper (25 janvier 1943‑26 août 2017) tire sa révérence.

 

Foyer et démons

Biberonné aux films de genre ‑son père était propriétaire d’un cinéma au Texas‑ Tobe Hooper intègre le département d’audiovisuel à l’université d’Austin, au début des années 60. Après un passage par la publicité, il réalise un court métrage en 1963, The Heisters, fable baroque et barrée dans laquelle trois comparses appréhendent la magie à des fins autodestructrices.

 

Occulté par le succès fulgurant du poisseux Massacre à la tronçonneuse, Eggshells, son premier long métrage (1969), s'affiche cependant comme un prélude aux mondes scindés et refoulés du cinéaste. Tandis qu’une poignée de hippies végètent à l’étage d’une maison, un autre type de paria s’adonne à d’étranges expérimentations au sous‑sol.


Le foyer à l’origine des maux et des démons de l’Amérique. En attestent les rednecks dégénérés et cannibales de Massacre. Dans Poltergeist (1982), la famille Freeling voit son quotidien aseptisé envahi d’âmes féroces ‑sa maison ayant été construite sur un ancien cimetière indien‑. De retour dans sa ville natale du Maine, l’écrivain Ben Mears (David Soul) réside dans un manoir peuplé de vampires (réalisé pour la télévision en 1979, Salem’s Lot est une adaptation du roman de Stephen King, lequel collabore au scénario).

 

La victime derrière le monstre

Marqué depuis l’enfance par la figure emblématique de la littérature gothique Frankenstein, le cinéaste a imaginé nombre de terrains de jeux déroutants, dans lesquels les masques tombent pour révéler l’être fragilisé, la victime derrière le monstre : Leatherface interprété par l’imposant Gunnar Hansen, le gamin difforme et déguisé de Massacres dans le train fantôme (1981)…


À toujours rôder du côté des freaks, Tobe Hooper côtoyait la marge comme personne. Il devient, à son tour, un monstre sensible qui poursuivra son étrange carnaval grâce à d’extraordinaires monuments d’épouvante.

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