Zombies Anonymous
Que seraient devenus les zombies de George Romero, si à peine revenus à la vie, ils avaient été dotés de parole, de leurs capacités motrices et armés de tous leurs souvenirs ? Ils auraient donc été presque aussi vivants que les vivants eux‑mêmes, puisque heureux bénéficiaires de notre précieuse conscience. Le réalisateur, Marc Fratto, s’est posé la question. Muni de sa caméra DV, il nous délivre une œuvre singulière et creuse en profondeur les thèmes chers au formidable créateur du zombie moderne, Romero, bien sûr.
D’emblée, la séquence d’introduction rend hommage aux nombreuses bandes d’actualités qui ponctuent Land of the Dead (2005) ou Diary of the Dead (2007). L’allusion explicite au « grand noir de la Nuit des morts‑vivants » laisse peu à peu la place à des évocations plus tacites, réservées aux adeptes du genre. Ainsi, les grands motifs romeriens y passent‑ils un à un, des effets abrutissants d’une publicité pour « teint vivant » adressée aux humains cadavériques de notre société de consommation, à la psychose généralisée qui s’étend dès lors qu’une population nouvelle (ou plutôt, dans la continuité de l’ancienne) tente de coexister avec les vivants.
Fratto en profite alors pour mettre sur le tapis la grande thématique de l’exclusion et de la discrimination au cœur d’une société sectaire et des effets radicalement suicidaires de l’asservissement universel : « vendre son âme aux vivants ou bosser pour l’Oncle Sam ».
Et que serait le film de Marc Fratto sans le sillage visionnaire de Romero ?