Dossier 137
Stéphanie, enquêtrice à l’Inspection générale de la Police nationale, est chargée d’un nouveau dossier : un jeune homme est blessé par un tir de Flash‑Ball lors d’une manifestation liée au mouvement des Gilets jaunes.
Police partout… justice nulle part ?
S’il y a des sujets rarement traités au cinéma, l’IGPN, la « police des polices », en est assurément un. Avec ce Dossier 137, le réalisateur Dominik Moll (La nuit du 12, Harry, un ami qui vous veut du bien) essaie tant bien que mal de remédier à cet écueil.
S’il y arrive assez bien, c’est sans doute grâce à un scénario tout de même assez rigide et une Léa Drucker incroyable de justesse, tiraillée entre la justice et l’institution policière dont elle fait partie. Ce Dossier 137, c’est avant tout une autopsie au millimètre, froide et sans affect d’un cas d’école ô combien banal : savoir s’il y a bavure policière ou maintien de l’ordre ?
Quelques moments anecdotiques et artificiels aèrent cependant le propos, comme cette histoire de chat errant. Mignonne mais bien inutile. Ils proposent des respirations mais alourdissent aussi parfois l'ensemble. Car avec Dossier 137, Dominik Moll autopsie minutieusement un fait divers. Il mène une enquête sans effet de scénario ou de rebondissements spectaculaires, cherchant la démonstration implacable. Véritable leçon de ténacité, son film en est presque clinique et c'est ce qu'il le rend fort. On pense aux pamphlets politiques d’Yves Boisset des années 70 ou au Polisse de Maïwenn, et on est rapidement aspiré par le travail de fourmi effectué par l’héroïne et son équipe pour aboutir, coûte que coûte, à la vérité.
Le droit de savoir
Sans cesse tiraillés entre leur fonction et leur corps de métier, les agents de l’IGPN sont les véritables héros du film. Des héros de l’ombre, honnis par leurs pairs, qui les considèrent comme traîtres, et par la population pour qui tous les flics se valent, dans une logique ACAB (« All Cops Are Bastards ») très à la mode depuis la crise des Gilets jaunes. En filigrane, le film interroge notre société. Sommes‑nous capables de juger la police ? Qui surveille ceux qui sont censés nous surveiller ? Surtout quand cette police des polices fait partie justement de la même institution : la police. Vertigineux…
Certainement bien moins fort que son sujet, le film de Dominik Moll en rebutera sans doute certains par sa froideur et son manque d’amplitude. Un parti pris qui, pour d’autres, est assurément sa principale qualité.