par Émilien Villeroy
15 janvier 2020 - 10h46

Queen + Béjart : Ballet for Life

année
2019
Réalisateurs
AvecMaurice Béjart, Brian May, Roger Taylor
éditeur
genre
notes
critique
5
10
A

Maurice Béjart, Queen et Mozart : voilà peut‑être l'une des rencontres les plus inattendues de la danse contemporaine européenne. Et pourtant, ce curieux mélange des genres est au cœur du ballet explosif Le presbytère (connu aussi sous le nom anglais de Ballet for Life), signé en 1997 par le chorégraphe franco‑suisse. Une œuvre sensible dédiée à « ceux qui sont partis trop tôt » et notamment deux artistes : Freddie Mercury, le chanteur de Queen, et le danseur Jorge Donn, proche de Béjart, tous deux décédés des suites du sida au début des années 90. Deux décennies plus tard, la création de ce ballet unique nous est présentée de l'intérieur avec Queen + Béjart : Ballet for Life. Ce nouveau Blu‑Ray édité cet automne chez Eagle Vision profite sans doute de la popularité renouvelée de Queen depuis la sortie de Bohemian Rhapsody.

 

Celui‑ci se compose en premier lieu d'un documentaire signé Lynne Wake, datant de 2017, qui revient sur la création de la pièce et sur sa réputation toujours durable aujourd'hui, faisant encore partie du répertoire régulier de la troupe de Béjart. Elle donne la parole aux danseurs originels de la troupe (et en premier lieu l'excellent Gil Roman, passé à la tête du Béjart Ballet de Lausanne peu avant le décès de son mentor en 2007) ainsi qu'aux musiciens de Queen, Brian May et Roger Taylor. Sous couvert d'un récit de la création de cette pièce étonnante, dont les audaces semblent être venues sur un coup de tête à Maurice Béjart, c'est aussi un portrait du début des années 90 qui est dressé : celui d'une poignée d'artistes ayant perdu des amis proches par la faute du sida et qui décidèrent de concentrer cette douleur dans une énergie créatrice nouvelle. Mélangeant interviews et archives d'époque, généreusement entrecoupé de mouvements dansés captés tantôt en 1997, tantôt en 2017 lors de répétitions avant une nouvelle tournée de l'œuvre, le documentaire est une belle plongée dans l'univers de Béjart et une preuve de l'impact de Queen à travers sa discographie, montrant la genèse de cet étonnant mariage entre hymnes rock et danse contemporaine. Il se termine d'ailleurs sur les images de la Première du ballet, à la fin duquel le groupe Queen était remonté sur scène pour interpréter The Show Must Go On avec Elton John (et qui sera la dernière apparition avec Queen pour le bassiste John Deacon, très affecté par le décès de Mercury).

 

Pour répondre à ce documentaire, le Blu‑Ray a également le bon goût de nous proposer une captation intégrale du ballet lors de sa première tournée mondiale en 1997. Les résultats sont cependant un peu plus mitigés. Tout d'abord du côté de la réalisation, profondément marquée par les années 90 : en dehors même d'une qualité visuelle assez médiocre, le montage est inutilement saccadé d'un bout à l'autre, nous gavant de plans sans laisser le temps de voir pleinement les mouvements de groupe et la composition générale sur scène. Zooms inutiles sur des visages qui ne laissent pas voir de corps, caméras penchées sur le côté qui cassent tout le jeu sur l'espace : la réalisation en fait trop, filmant le ballet comme s'il s'agissait d'un concert de rock ‑un postulat fort à‑propos niveau bande‑son mais assez fatiguant au bout de 90 minutes.

 

Mais c'est aussi le spectacle en lui‑même qui laisse une drôle d'impression. Assez décousu, enchaînant en vrac les morceaux de Queen (dont principalement des extraits du disque posthume Made in Heaven qui est loin d'être une pièce angulaire de la discographie du groupe si l'on veut rester poli) entre deux interludes de Mozart (qui donnent lieu à de beaux passages quoique un peu hors‑sujet), Le presbytère est un drôle de ballet, souvent ringard (les costumes rococo 90's de Versace n'aident pas) mais assez chaleureux, pouvant passer de mises en scène superbes et émouvantes (l'ouverture avec les draps blancs, les danseurs enfermés dans leur boîte juste avant Radio Ga Ga) à une grande confusion doucement ridicule ayant des allures de spectacle de fin d'année, surtout quand il est rythmé par certains morceaux très pompiers de Queen. D'aucuns pourront y trouver un beau mélange des genres mariant danse et rock avec une énergie très pop (et avec une vraie maîtrise, comme en témoignent certains solos de Gil Roman, incroyables à regarder), d'autres risqueront de rester assez froids face à une œuvre un peu datée. Une curiosité qui saura cependant pleinement contenter les fans de Maurice Béjart et les plus curieux admirateurs de Queen.

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blu-ray
cover
Tous publics
Prix : 19,99 €
disponibilité
06/09/2019
image
1.77
HD 1 080i
16/9 et 4/3
bande-son
DTS-HD Master Audio 2.0
LPCM stéréo
sous-titres
Français, anglais, allemand, espagnol
5
10
image

Une qualité très variable pour ce Blu-Ray. Côté documentaire, rien à dire, les images récentes affichent une belle définition. Le résultat est plus discutable cependant pour les archives et principalement celles du ballet, qui souffrent d'une qualité franchement passable, avec de nombreux pépins : blancs hyper-saturés, manque de détail et images qui sautent. Une qualité qui donne parfois l'impression de regarder un gala filmé sur caméscope depuis les gradins. Dommage, d'autant que le ballet a été rejoué très régulièrement depuis sa création et que le documentaire montre des répétitions récentes qui auraient pu être proposées en bonus ou intégrées plus longuement dans le documentaire.

7
10
son

Il faudra se contenter d'une piste 2.0 pour le documentaire comme pour le ballet. Rien de bien grave cependant car la qualité reste bonne et convient tout à fait pour apprécier le spectacle, principalement articulé autour d'extraits studio et live de la carrière de Queen.

3
10
bonus
- Making of (1997) (23')

En plus du combo ballet et documentaire, cette édition est également augmentée d'un making of du spectacle datant de l'année de sa création, 1997. Si l'intention est louable, difficile de ne pas y voir une totale redite par rapport au reste du Blu-Ray : on retrouve telles quelles des images de la captation à Lausanne et l'entretien donné à l'époque par Béjart, repris dans le documentaire principal. Reste des interviews d'époque avec les même intervenants (Brian May et Roger Taylor en tête) qui permettent de constater que tout ce petit monde n'avait pas grand-chose de plus à dire en 2017 qu'en 1997.

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