par Jean-Baptiste Thoret
24 janvier 2011 - 15h02

Wall Street 2, l'argent ne dort jamais

VO
Wall Street : Money Never Sleeps
année
2010
Réalisateur
InterprètesMichael Douglas, Shia LaBeouf, Carey Mulligan, Josh Brolin, Eli Wallach, Susan Sarandon, Frank Langella
éditeur
genre
notes
critique
5
10
A

On peut voir et revoir Wall Street d’Oliver Stone, le premier volet, comme un formidable document sur l’Amérique, et donc le monde, des années 1980. La décennie des brushings et de Reagan, de George Michael et de l’aérobic, du sourire carnassier de Larry Hagman dans la série Dallas et de l’arrogance clinquante d’une nouvelle race de winners qu’on appelait alors les « yuppies ».

Réalisé en 1987 juste après Platoon et un an avant le krach boursier, Wall Street ajoutait une nouvelle figure au panthéon des bad guys fascinants du cinéma hollywoodien : Gordon Gekko (Michael Douglas), trader impitoyable aux cheveux lissés, amateur d’aphorismes tranchants (« Si tu veux un ami, prends‑toi un chien »), esthète raffiné et beau parleur brillant en regard duquel les héros humanistes du cinéma américain passaient alors pour des individus ternes et moralisateurs, mous et privés d’éclat.

Comme Tony Montana (Scarface), son alter ego mafieux devenu lui aussi une matrice contemporaine, Gekko incarnait toute une série de valeurs (l’obsession de la réussite, l’individualisme forcené, le mépris des faibles et des idiots) auquel le monde a finalement donné raison. En faisant de Gekko une icône instantanée, les traders de Wall Street ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. Cette méprise a, paraît‑il, toujours chiffonné Oliver Stone qui, vingt‑deux ans plus tard, a décidé de remettre Gekko dans le jeu des finances d’aujourd’hui ‑post‑crise, post‑Lehman and Brothers, etc.‑, et de remettre enfin les points sur les « i ».

Après huit ans passés derrière les barreaux, Gekko sort donc de prison, mal rasé, sans le sou, flanqué d’un portable d’époque genre talkie‑walkie. Une limousine s’approche, il croît que c’est pour lui. Fausse piste, un rappeur gangsta s’y engouffre. Raccourci formidable et meilleure idée du film. Pour le reste, Stone se débat pendant 130 longues minutes avec un scénario invertébré, répétitif, jargonneux (« shortage », « hedge funds », « aléa mora ») et truffé de sous‑intrigues avortées.

À droite, Gekko tente donc de remonter la pente des affaires et de regagner le cœur d’une fille à dormir debout (Carey Muligan, plus jamais ça), fiancée à un jeune trader écolo‑idéaliste (Shia LeBeouf) qui reprend péniblement la ligne tracée par Charlie Sheen en 1987. À gauche, des banques d’investissements qui s’effondrent, des OPA sauvages filmées de façon poussive et des requins cyniques qui exigent de la FED, et donc des contribuables, qu’elle éponge leurs dettes. Scandale !

On pensait que la crise financière de 2009 allait permettre à Oliver Stone d’actualiser sa critique du système financier, mais ce qui percutait hier (« l’avidité, c’est bien ») appartient aujourd’hui au bréviaire consensuel du commentaire médiatico‑politique. « La spéculation est la mère de tous les maux » peut alors lancer l’ex‑gourou des affaires devant un parterre médusé d’apprentis traders et de spectateurs assoupis par un anti‑capitalisme devenu lot commun. On est tous d’accord.

Et Gekko dans tout ça ? Hormis une séquence finale qui fleure bon la greffe de circonstance (Gekko attendri par la vision échographique de son futur petit‑fils, grotesque), l’homme redevient ce qu’il a toujours été, cynique, manipulateur, éclatant, et c’est tant mieux. Reste Michael Douglas, toujours aussi bon, point d’ancrage et d’attraction du film.

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Wall Street : Money Never Sleeps
Tous publics
Prix : 29,99 €
disponibilité
02/02/2011
image
2.35
HD 1 080p (Mpeg4 AVC)
16/9 natif
bande-son
Français DTS 5.1
Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
Anglais Dolby Digital 5.1 Audio Description
Italien DTS 5.1
sous-titres
Français, anglais pour sourds et malentendants, danois, finnois, italien, néerlandais, norvégien, suédois
10
10
image
Nickel du début à la fin. Si le fond est discutable, la forme fait le plein de qualités : gros plans, ville de New York, somptueux loft, tout est beau. De la matière mais pas trop, des noirs corsés, des effets amusants (le cours de la bourse en surimpression de l'image, les chiffres qui défilent à tout allure sur les visages…), beaucoup de précision et de classe. Une grande maîtrise technique.
8
10
son
VO et VF n'ont rien à voir. Malgré ses nombreuses qualités, la piste DTS 5.1 ne soutient pas la comparaison avec sa consœur anglaise DTS-HD Master Audio 5.1 : moins de chaleur, moins de dynamique, moins de précision… On dirait qu'elle reste scotchée à l'avant (pourtant, ce n'est pas le cas). La VO, totalement enveloppante et pas timide en basses, multiplie les détails un peu partout et crée une belle sensation d'ampleur et de richesse. Sans parler du jeu ciselé et piquant de Michael Douglas…
8
10
bonus
- Commentaire audio d'Oliver Stone
- Oliver Stone et les acteurs en HD (16')
- Grandeur et décadence de Wall Street en HD (50')
- Scènes inédites commentées par Oliver Stone en HD (30')
- Focus sur les cinq principaux personnages en SD (20')
- Bande-annonce
- DVD du film
- Option de copie digitale
Une belle édition côté interactivité. Commençons par Oliver Stone, qui parfois commente réellement les images qui défilent devant nous, et parfois s'en éloigne vraiment, ce qui a tendance à nous faire plutôt penser à un entretien plaqué sur les images du film. Cela dit, on y grignote pas mal de choses plutôt intéressantes. Entre autres anecdotes, celle des tableaux en vente dans une rue de Wall Street. Scène qui a dû être entièrement retouchée numériquement pour éviter des problèmes de droits d'auteur avec l'artiste-peintre en question. Quant à Josh Brolin, plus tête brûlée, y'a pas ! Faire la course en moto avec Shia LaBeouf après une cuite sévère, ce n'était pas malin… Pas d'accident, heureusement. On apprécie également la conversation entre les comédiens et le réalisateur. Tous réunis autour d'une table, ils évoquent la saga Wall Street (avec images du premier film à l'appui), le point de vue des deux longs métrages et leur rôle respectif. Bon point aussi pour le parallèle entre les deux films dans le module « Grandeur et décadence de Wall Street » et le petit retour historique sur les années 80, ou encore ce quartier de New York portant le nom du mur monté jadis pour se protéger des Hollandais venus commercer avec les Indiens.
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