Madagascar, le monde perdu
Madagascar est une terre unique, fruit de la dislocation du supercontinent Gondwana. D'abord séparée de l'Afrique au Jurassique, puis de l'Asie au Crétacé, l'île, immense (elle s'étend sur près de 1 600 km du nord au sud) et isolée depuis des millions d'années, a vu sa faune et sa flore se développer indépendamment, si bien qu'environ 75% des espèces animales et végétales du pays sont endémiques. Dépourvue de grands prédateurs mais dotée d'une variété inouïe de paysages et d'animaux merveilleux, Madagascar ressemble bien à un paradis perdu, territoire où la vie semble suivre son cours comme en des temps reculés, et ce, malgré les climats les plus rudes (forte humidité à l'est, sécheresse extrême à l'est).
C'est cette beauté grandiose et unique que s'attache à montrer cette série documentaire de BBC Earth (Yellowstone, la lutte pour la vie) en trois épisodes (Une île prodigieuse/Des paradis perdus/Terre de chaleur et de poussière), dévoilant des créatures extraordinaires comme ce scarabée girafe, formidable petit architecte capable de plier et d'enrouler une grande feuille d'arbre pour y loger son œuf. On y découvre également le plus petit caméléon du monde, à peine plus long qu'une grosse fourmi. Animal emblématique de Madagascar, le lémurien est ici filmé sous toutes ses coutures, chacune des espèces (lémur catta, lémur à ventre roux, hapalémur…) révélant leurs us et coutumes et la spécificité de leur pelage. Et même si l'on se garde bien de verser dans l'anthropomorphisme, difficile de ne pas noter les similitudes entre l'Homme et ces petits primates, sociables et aux mains particulièrement agiles.
Au gré de time‑lapses somptueux et de prises de vues incroyables (on visite même l'intérieur d'une plante carnivore en plein repas), Madagascar déploie toutes ses splendeurs, ses hauts plateaux évoquant le Grand Canyon, ses Tsingy tranchants (forêt d'éperons calcaires), ses baobabs millénaires, sa jungle luxuriante. Mais l'île dévoile aussi sa fragilité, sa vulnérabilité. Car le joyau de l'océan Indien a perdu de sa superbe au fil du temps, des défrichements, des brûlis. On estime la perte des forêts d'origine à environ 80%. Cette série doc haut de gamme, véritable travail d'orfèvre ayant nécessité des trésors de patience et d'ingéniosité (voir les making of pour s'en convaincre), rappelle qu'il est urgent d'agir, et plus que jamais indispensable d'apprendre à contempler.