Les tourmentés
Un ex‑légionnaire sans domicile fixe, qui essaie de se rabibocher avec son ex‑femme, est contacté un jour par un ancien frère d’armes pour un étrange contrat : servir de gibier contre une grosse somme d’argent.
Les chasses du compte est bon
En adaptant son propre roman, le réalisateur Lucas Belvaux n’a pas vraiment choisi la facilité tant sa construction à la Rashōmon n’aidait pas forcément à une transposition sur grand écran. Contrairement à l’histoire du film de Kurosawa, le récit de Belvaux est nettement plus introspectif. On reconnaît dans son film son roman, mais il ne faut pas s’attendre à une transposition littérale, vous voilà prévenu.
Par ailleurs, Les tourmentés n’est pas un énième remake ou une réinterprétation des Chasses du comte Zaroff, même si c’était effectivement le projet de départ du réalisateur. Le film tient davantage de la réflexion sur la nature humaine qu’une chasse à l’homme sanguinaire. On pourrait presque parler d’une chasse à l’humanité. C’est assez déroutant, puisque tout le film est une attente qui joue avec les instincts voyeuristes qui sommeillent en chacun de nous, à coups d’images aussi furtives que violentes. Le film dérange, et ce n’est pas son défaut, au contraire.

© David Koskas
Les proies
Peu à peu, le piège du film se referme. Et ce n’est pas tant celui tendu par Ramzy Bedia à Niels Schneider que celui qui attrape les spectateurs qui intéresse le réalisateur. Par petites touches, il distille les traumatismes des trois protagonistes, puis questionne le spectateur sur son humanité. Où la situe‑t‑il‑? Qu’est‑ce qui fait le prix d’un homme ?
Évidemment, il en découle un film assez bavard où chasseurs et chassés questionnent leur morale et la nôtre sans pour autant se courir après. Tout au long du film, cette notion va même fluctuer et Les tourmentés révéler sa véritable nature : un film sombre qui tend vers la lumière en bousculant nos certitudes.
Parfois assez prévisible et caricatural, souvent trop minimaliste, le film n’est sans doute pas à la hauteur de son sujet. Il a néanmoins le mérite de poser des questions et d’ouvrir une réflexion là où beaucoup d’autres auraient opté pour une simple efficacité.
Au final, le film est assez frustrant car il ne répond pas à sa promesse. Il n’est pas inintéressant pour autant. Par bien des aspects, il apporte un éclairage nouveau sur un postulat classique du cinéma de genre. C’est certes assez mince pour un grand film, mais suffisant pour un beau duo d’acteurs que l’on avait déjà vu à l’œuvre (dans un registre bien différent) dans la série D’argent et de sang. Deux éléments ici également bien présents.