par Laurence Mijoin-Duroche
13 décembre 2019 - 15h31

Midsommar

année
2019
Réalisateur
InterprètesFlorence Pugh, Jack Reynor, Will Poulter, William Jackson Harper, Wilhem Blomgren
éditeur
genre
notes
critique
8
10
label
A

Dévastée par une tragédie familiale, Dani (Florence Pugh, The Little Drummer Girl) accepte de suivre son petit ami Christian (Jack Reynor) ‑qui était sur le point de la quitter‑ et ses amis en Suède pour un festival estival au folklore coloré. Mais sous le soleil de minuit, le monde s'inverse…

 

Un an après Hérédité (2018), le réalisateur et scénariste américain Ari Aster revient avec un second long métrage qui confirme les espoirs placés en lui. Et, à nouveau, glisse un drame personnel (ici familial et amoureux) dans une proposition inédite de cinéma d'horreur dépouillée de ses effets traditionnels.

 

Midsommar (mi‑été en suédois) est un éclatement total. Éclatement de la rétine, d'abord, car ici, tout est baigné de lumière, en permanence (on préférera d'ailleurs la version cinéma au Director's Cut, où vient notamment s'ajouter une scène nocturne qui brise le règne du soleil et l'unité stylistique). Après un prologue tragique dans la nuit noire et froide américaine, rupture de ton : voilà une Suède pastorale, isolée du monde, jonchée de fleurs d'or, plongée dans un jour sans fin, où les gens, extatiques, virevoltent en habits blancs. Rien n'est dissimulé, sauf, parfois, ce qui se trame hors champ. Le cadre est large, le temps est long, aucune ombre ne vient cacher la réalité. Là est la surprise, tout se joue comme annoncé, comme suspecté, comme un enchaînement implacable.

 

Éclatement des codes, ensuite. Car au‑delà de l'expérience sensorielle, c'est notre perception du monde qui s'en trouve bouleversée. En plongeant un échantillon de société dysfonctionnelle (le groupe « d'amis ») au cœur d'une communauté évoluant en harmonie, Ari Aster nous interroge sans jamais nous permettre de réellement choisir notre camp. Quel regard portons‑nous sur ces rites perçus comme des abominations mais qui permettent pourtant de sauvegarder l'unité d'un groupe d'êtres humains vivant en symbiose, comme les cellules d'un même organisme, tandis qu'en face, les jeunes Américains n'ont de cesse de privilégier l'individu au détriment du tout. Quitte à mettre en péril leur modèle de société. On pourra d'ailleurs reprocher l'utilisation archétypale des personnages américains, chacun incarnant peu ou prou un péché : le mensonge, l'hypocrisie, l'égoïsme, la malhonnêteté intellectuelle, l'insensibilité, l'indifférence.

 

Un emploi heureusement compensé par l'ajout de quelques personnages secondaires plus équilibrés dans leur « normalité » et surtout de Dani, jeune femme incarnant la bonté naïve, la délicatesse, mais aussi le manque d'estime de soi. Visage lunaire, Florence Pugh, révélée dans The Young Lady (2017), brille ici en âme éteinte, qui va éclore dans ce bain de jouvence païen, cruel par nature, impitoyable mais sans noirs desseins.

 

C'est là que l'on trouve dans Midsommar d'autres choses que dans le classique The Wicker Man (1973), influence évidente, d'un point de vue situationnel tout du moins. Car ici, la secte, aux rites tour à tour hypnotiques, logiques, gracieux, atroces, joyeux ou grotesques, libère l'héroïne de son deuil, mais aussi de son emprisonnement mental, tout en l'enfermant dans d'autres codes. N'y aurait‑il aucun espoir d'affranchissement au sein du monde des hommes ? Ari Aster, anthropologue, nous pose la question. Mais surtout, nous organise une mémorable fête païenne.

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- de 12 ans
Prix : 29,99 €
disponibilité
02/12/2019
image
1.85
HD 1 080p (AVC)
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 5.1 (version cinéma uniquement)
Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
sous-titres
Français
8
10
image

À la fois doux et violent, lumineux et sombre, rassurant et angoissant, le film d'Ari Aster décontenance d'emblée par son atmosphère visuelle emprunte de sérénité, au plus près de la nature, et la rudesse de son propos pour le spectateur. Un aspect duel qui décontenance au moins autant que les événements qui se déroulent dans et hors cadre. 

 

Évidemment, on notera toute la symbolique du triangle, motif décliné à l'infini dans le film. Ainsi que l'architecture figurative des bâtiments (voire la grange en forme de gros panneau d'avertissement jaune à la porte d'entrée très évocatrice). Un film tout en symbolique, où le blanc et la lumière dominent à l'excès.

8
10
son

Hors des codes classiques du genre, Midsommar surprend par ses ambiances naturelles très travaillées, ses effets sonores appuyant les conséquences des prises de substances hallucinogènes diverses et variées, et les silences qui n'en sont pas jamais vraiment (une perturbation sonore est sans cesse présente). Une plongée à l'envers, un trip, une expérience. À noter que la VF présente des voix à la tonalité beaucoup plus jeune et naïve qui colle vraiment moins bien au récit.

5
10
bonus
- Que les festivités commencent (25')
- Construction du village (33')
- Choix de la version cinéma ou Director's Cut
- Teaser et bandes-annonces

Énorme timelapse de 30 minutes pour suivre la construction du village pas à pas. Un peu longuet quand même, on accélère un peu pour plus d'effet.

 

Dans le module consacré au film, le réalisateur Ari Aster se confie sur l'origine du script, soit la rupture visiblement compliquée avec sa femme. Un peu plus loin, l'équipe parle de son sens de la mise en scène, de sa technique très chorégraphiée de tournage et de la difficulté de certaines scènes, comme celle de la danse des villageoises (deux jours de danse avec les caméras et des dizaines de figurantes). 

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