Schizophrenia
Ce fut pendant longtemps l’une de ces perles cultes et sulfureuses que l’on s’échangeait sous le manteau et en VHS dans les années 1980. Réalisé en 1983 par Gerald Kargl, un cinéaste autrichien, Schizophrenia n'a jamais connu, en France, les honneurs d’une sortie en salles et acquit peu à peu, auprès des cinéphiles et des fans de cinéma hardcore, une réputation de film radical et hyper‑violent, sorte de chaînon manquant entre le Funny Games de Haneke et les films de Gaspard Noe.
Noe, justement, qui intervient largement dans les bonus et dit tout le bien et l’influence de Schizophrenia sur son travail, explique combien l’utilisation de la voix off et l’invention d’un système de filmage par réflexion (la caméra capturait le reflet de l’action dans un miroir), ont pu le marquer.
Le récit de Schizophrenia n’a pourtant rien de révolutionnaire : un tueur non guéri de ses pulsions meurtrières (Erwin Leder), libéré de son asile psychiatrique, s’introduit dans une maison et va assassiner ses occupants un à un, de façon aussi déterminée que chaotique.
L’intérêt de Schrizophrenia, film de serial‑killer d’une noirceur totale, réside dans la façon dont la voix off du tueur, omniprésente, y compris pendant les séquences de meurtre, évoque les souvenirs auxquels les crimes renvoient et introduit ainsi une distance constante qui empêche l’identification directe au personnage. De la même façon, la caméra, qui semble toujours flotter autour du tueur, procure le sentiment d’un film mental, à ne pas mettre, bien sûr, devant tous les yeux. Une rareté qui réjouira les amateurs de cinéma extrême (et intelligent).